Abraham Lincoln, en paraphrasant les Évangiles, disait, pour parler de la guerre civile qui frappait les États-Unis, qu’une maison divisée contre elle-même ne peut pas tenir debout.
Aujourd’hui, si la situation n’en est pas au même point que durant le déchaînement sanguinaire de la Guerre de Sécession, il est tout de même clair que la Maison Amérique est de nouveau profondément divisée sur elle-même. Divisée philosophiquement, religieusement, géographiquement, culturellement, les Etats Unis d’Amérique de 1865 n’a jamais semblé être aussi disharmonieuse. Mais si, sur toutes les lignes, l’Amérique se divise pour la première fois, une ligne de front se forme.
Dans ce feuilleton de l’abîme qui se creuse entre Républicains et Démocrates, un nouvel épisode vient de se produire quelque part à la frontière sud du pays qui fait écho de façon ironique à la vieille Guerre Civile car, pour la première fois, des enjeux militaires et des lignes de fractures entre états sont ouvertement apparentes.
La situation à la frontière sud des Etats Unis est très tendue, plusieurs milliers de migrants, venus des régions traversées par le crime de l’Amérique Centrale, que les Démocrates surnomme les “dreamers”, franchissent illégalement la frontière sud, principalement via le Texas, qui s’oppose à cette immigration clandestine notamment du fait de la présence de membres des cartels infiltrés dans les convois (et faisant entrer sur le territoire étatsunien de la fentanyle, drogue aggravant une terrible crise sanitaire touchant le pays) et du fait de nombreux trafiquants d’êtres humains qui profitent du chaos pour exploiter les populations immigrées.
Le Texas a ainsi déclaré un état d’urgence, et compte tenu de l’ampleur sans précédent des traversées illégales de la frontière, et des discours de certains nationalistes mexicains parlant de Reconquista, déclarait que l’Etat était victime d’invasion.
La question de l’immigration est une des plus contentieuses aux Etats-Unis, pour des raisons différentes de l’Europe.
Nous nous rappelons tous du “Build the Wall” de Donald Trump de la campagne de 2016.
La lutte contre l’immigration illégale est devenue, depuis, le cheval de bataille des Républicains.
Les Démocrates, quant à eux, particulièrement installés dans les grandes métropoles éloignées de la frontière, semblaient avoir jusque là adopté une position très positive vis à vis de cette immigration nouvelle, d’où le surnom de “dreamer” donné à ceux qui passent illégalement la frontière, les comparant en cela aux immigrés légaux et attendus d’Ellis Island du siècle dernier, voyant dans ces gens, travailleurs et quittant des pays traversés par une corruption et le crime endémique, des “exténués, des pauvres”, “des déshérités que la Tempête apporte” pour paraphraser le fameux poème d’Emma Lazarus inscrit sur la Statue de la Liberté.
Si certains Etats et localités démocrates, face à l’afflux de migrants (envoyés par les Etats républicains en bus), commencent à changer, notamment à New York, bien que la ville continuant hypocritement de s’appeler une ville “sanctuaire” (une ville acceptant, ou tout du moins prétendant accepter l’immigration clandestine), l’Etat Fédéral, contrôlé par le Président Joe Biden, entend bien continuer une politique complaisante envers l’immigration clandestine, en témoigne le fait que Kamala Harris soit en charge du dossier de la frontière où elle ne s’est déplacée qu’une seule fois après plusieurs mois de critiques républicaines pour simplement prononcer le risible “do not come” et en témoigne aussi ces fameuses oppositions entre Biden et Greg Abbott, gouverneur de l’état du Texas, sur la question de la frontière.
Plus récemment, on peut parler de l’intervention à la Chambre des Représentants, d’un Représentant démocrate mettant en garde avec le plus grand sérieux du monde contre le plan des “Républicains MAGA” d’installer des douves remplies d’alligators à la frontière pour faire fuir les migrants, ce dernier ayant surement pris une boutade de Donald Trump, connu pour son humour exagéré, pour une réalité, déclaration fantaisiste d’un Représentant démocrate reçue avec ironie par les commentateurs conservateurs.
En effet, face à la situation, le Gouverneur du Texas considérant que la sécurité de l’Etat étant engagée, était dans ses dispositions constitutionnelles de déclarer un état d’urgence afin de déployer la Garde Nationale pour protéger la frontière, au grand désarroi du Président Biden et des Démocrates via le DOJ Department of Justice qui ont déposé une plainte à la Cour Suprême des Etats Unis, notamment concernant l’utilisation de dispositifs de protection pour dissuader la traversée du Rio Grande par les immigrés illégaux dans le cadre de l’opération Lone Star.
Les troupes texanes de la Garde Nationale ont fait face à des troupes fédérales venues enlever les dispositifs afin d’ouvrir la frontière à la suite de la décision de la Cour Suprême. Les questions de droits des États et de prérogatives constitutionnelles n’ont pas été aussi brûlantes qu’en ce moment où de nouveau, un clash semblait imminent entre troupes de la Garde Nationale texane défendant leur État et, de façon étrange, troupes fédérales venues ouvrir la frontière pour laisser passer des non-nationaux.
Face à cela, plus de la moitié des gouverneurs des autres États de l’Union, quasiment tous les États et gouverneurs républicains, ont signé une lettre en soutien à Greg Abbott, lui même Gouverneur du Texas, et au droit de l’État du Texas de protéger sa frontière contre les ambitions de l’État fédéral de l’ouvrir.
Beaucoup ont ainsi vu dans cette division extrême, et ces débuts de militarisation, les véritables prémices d’une nouvelle guerre civile, d’autant plus que la quasi-totalité des États sudistes de l’ancienne Confédération se sont alignés sur le Texas.
Cela est particulièrement intéressant car nous touchons par là du doigt un des plus anciens débats juridico-philosophiques de l’histoire des Etats Unis, celui de savoir quelle est la nature même de la nation américaine : est-ce un état central reliant des états dont il est le souverain ou bien une confédération d’états constitutifs d’une Union qui ne serait finalement que la manifestation souveraine de se construire un destin et une direction commune fondés sur les principes de la “vérité évidente en soit que tous les hommes naissent libres et égaux en droit et pourvus par la providence des droits inaliénables parmis lesquels sont la vie, la liberté et la recherche du bonheur”?
Cette seconde interprétation semble être celle des Pères Fondateurs en témoignent, par exemple, les fameux articles de la Confédération ou, encore, la nature même des congrès continentaux tournée vers les états bien que diverses expressions de cette idée, allant vers plus ou moins de fédéralisme, allant de Jefferson à Hamilton, ont pu être exprimées par les Pères Fondateurs eux-mêmes.
Nous retrouvons encore une vision d’un état fédéral devant être maintenue à minima chez les Républicains actuels, par exemple, l’ex candidat à la primaire républicaine 2024, Vivek Ramasawmy, qui avait dans son programme l’idée de réduire drastiquement le nombre d’employés de l’état fédéral, la vision d’un état fédéral faible, bien qu’il ne faille pas réduire les questions de fédéralisme contre droits des Etats à une ligne de fracture partisane, l’histoire politique américaine étant remplie de Démocrates et de Républicains travaillant suivant les deux optiques.
Nous pouvons, néanmoins, marquer un moment charnière dans la première moitié du XXème siècle avec le Républicain Calvin Coolidge, partisan d’un état peu présent, et le Démocrate Franklin D Roosevelt, dont le programme du New Deal a fortement étendu, en bien ou en mal, les forces de frappe de l’état fédéral.
La Constitution, écrite pour pallier aux difficultés que rencontrait la ligue, que constituaient entre eux les Etats nouvellement indépendants de la couronne d’Angleterre, sans pour autant trahir ses premiers principes, contribua à bâtir un état fédéral plus actif et puissant.
Pour comprendre, avant de nous intéresser au Second Amendement qui constitue un des coeurs du questionnement actuel, attardons nous sur le préambule de la Constitution :
“We the People of the United States, in Order to form a more perfect Union, establish Justice, insure domestic Tranquility, provide for the common defence, promote the general Welfare, and secure the Blessings of Liberty to ourselves and our Posterity, do ordain and establish this Constitution for the United States of America.”
En français :” Nous, le peuple des Etats Unis, afin de former une union plus parfaite, établir la Justice, assurer la Tranquillité nationale, offrir une défense commune, promouvoir le bien commun et sécuriser la bénédiction de la Liberté pour nous et notre prospérité et ainsi nous proclamons et établissons la Constitution des Etats Unis d’Amérique”.
La constitution, par là, donne bel et bien naissance à un état, mais ce n’est pas pour autant que le fameux droit des états est négligé et écrasé.
Cet état fédéral, ainsi pensé par les rédacteurs de la Constitution, n’est pas un état qui vient écraser les volontés diverses composant l’ancienne fédération mais vient, bel et bien, former une “union plus parfaite” en accord et suivant la volonté du peuple qui établi de façon plus grande et sûre les bases d’une union qui n’est pas nouvelle mais qui est la continuation de ces droits inaliénables précédemment cités.
Dans une optique Tocquevillienne avant l’heure, afin d’asseoir ces attentes formulées par le préambule de la Constitution, tout en renforçant l’idée des Etats Unis comme bel et bien une union et non pas juste une collection d’entités indépendantes, les amendements et la Constitution, elle-même, sont conçus dans une optique de protéger les minorités de la majorité, et, ainsi, les états eux mêmes qui constituent un lieu d’expression démocratique et même jouissent, d’une certaine manière, de la détention de droits quasi-souverains, non pas octroyés par une constitution pratiquant la décentralisation, mais ré-affirmés et garantis par une constitution qui est l’expression de leur volonté d’union.
Le deuxième amendement, celui que l’on réduit souvent comme garantissant le port d’armes aux citoyens, est aussi une garantie, dans le “Bill of rights” (la collection des premiers amendements des Etats Unis garantissant les droits les plus fondamentaux du citoyen américain), de la possibilité pour les Etats de s’organiser en cas de défaillance de l’Union, dans l’éternel peur libérale de l’état se retournant contre sa mission première de défense des droits citoyens, ce à quoi la Constitution vient répondre en donnant un droit aux états de défendre leurs citoyens face aux hypothétiques défaillances fédérales via les fameuses “milices bien organisées” que garantit ce fameux deuxième amendement et qu’invoque le Texas dans l’affaire qui nous regarde, considérant ainsi que l’État Fédéral, en n’agissant pas sur la question de la défense de la frontière, rompt les promesses apportées par la Constitution sur la sécurité de la nation.
Il ne faut ainsi pas vo-ir dans ce mouvement un mouvement de néo-confédérés, si la question du droit des Etats était déjà invoquée par le Sud durant la Guerre Civile, la cause de cette guerre avait aussi beaucoup à voir avec des idées de droits fondamentaux et de renouveler l’idée des Pères fondateurs, voire pour cela l’adresse de Gettysburg, d’autant plus que les “insurrectionnistes” dans cette guerre là étaient, à l’époque, les Démocrates, et de façon plus philosophique, nous pouvons avancer que, à l’inverse des idées de la “cause perdue” avancée par certains sudistes stipulant que la Confédération n’était qu’une volonté d’émancipation nationale du peuple du Sud menacé dans ses droits par un état fédéral voulant lui imposer des coutumes étrangères et détruire leur liberté (lire “Autant en Emporte le Vent” de Margaret Mitchell ou son adaptation au cinéma par Victor Fleming ) la cause de l’Union et du Nord était bel et bien de favoriser cette “union plus parfaite” et pas d’imposer aux états sudistes la vision lincolnienne.
Ainsi, le fameux épilogue de l’Adresse de Gettysburg dans lequel le Président Lincoln fait le voeu qu’aucun soldat ne soit mort en vain car “un gouvernement du peuple par le peuple et pour le peur ne devra jamais s’éteindre de la surface de la terre” et l’introduction de la même adresse dans laquelle il affirme se tenir dans les pas de ses pères qui ont “établi sur ce continent une nouvelle nation fondée sur le principe que tous les hommes sont libres et égaux”.
Par là, le combat de l’Union n’était pas celui contre le droit des États mais bien le renouvellement des idées formulées quelques décennies plus tôt par “We the People”.
La reconstruction, par là, avec tout de même aussi des injustices faites aux populations sudistes, si elle restreint le droit des états notamment dans leurs choix de représentants, via certaines parties aujourd’hui débattues du XIV amendement, en rapport avec les événements du 6 janvier 2020 (les autres parties de cette amendement portant sur les droits civiques garantis aux anciens esclaves et ne sont évidemment plus débattus) le fait est que l’Etat Fédéral n’a jamais, en dépit de l’insurrection, complètement aboli ces droits des Etats et ainsi en conséquences négative n’a pas pu empêcher la création par les Démocrates des lois de Jim Crow créant la ségrégation, mais est resté fidèle à cette vision là avec le débat opposant fédéralisme et droits des états continuant d’exister mais sur des bases méta-partisanes, ni Démocrates ni Républicains ne s’arrogeant en tant que parti seul, une ou deux de ces visions.
Si cette opposition philosophico-juridique est au coeur des questions qui nous préoccupent au Texas, ce n’est néanmoins pas l’idée de droits des états (ou alors discutée au niveau institutionnel juridiquement via notamment l’arrêté controversé de la Cour Suprême fédérale) qui est discuté et qui fait débat, mais au final, ce sont les idées de frontière qui font question, quand bien même les Démocrates semblent convertis depuis le New deal au fédéralisme et jouent beaucoup de l’imagerie sudiste pour vilipender les texans et leurs états alliés.
Aussi, cette opposition radicale n’est pas purement géographique, les Yankees du New Hampshire soutenant le Texas alors que les Sudistes de Caroline du Nord, non, de plus beaucoup d’États de l’ouest, traditionnellement d’un rouge profond soutiennent le Texas alors qu’ils n’ont rien à faire dans cette vieille histoire de Sécession.
D’ailleurs, à part pour quelques mêmes internet, l’imagerie que convoque ces “insurrectionistes” comme les appellent certains Démocrates, n’est pas celle du Old Dixie, mais plutôt de 1776 et de la Guerre d’Indépendance, les Gadsden Flags sont beaucoup plus nombreux que la bannière de guerre des Confédérés, et, l’image qui revient le plus sur les réseaux sociaux dans cette histoire n’est pas celle du Général Lee mais celle de George Washington franchissant le Delaware.
Il ne faut pas non plus avoir de vision racialiste du conflit, comme le font les Démocrates, le Texas est un état qui depuis toujours est nourri de culture hispanique, hispaniques texans qui d’ailleurs votent souvent plus pour le GOP Grand Old Party que pour les Démocrates alors qu’ils appartiennent aux mêmes espaces culturels que les nombreux immigrés illégaux qui traversent la frontière, certains mêmes sont, ou ont pour ancêtres eux-mêmes, des “dreamers” régularisés puis enracinés de l’autre côté du Rio Grande, il n’en demeure pas moins qu’ils sont sensibles à ces questions de sécurité, justement car devant vivre souvent dans les mêmes quartiers que les membres de cartels et ainsi, au Texas, ou encore plus représentativement en Floride, les américains hispaniques votent à présent rouge pour ces problématiques mais aussi, car souvent, ils sont plus conservateurs que progressistes et placent la famille et la religion en valeurs cardinales.
La véritable carte de cette opposition n’est pas celle des gouverneurs signataires mais bien celle de l’Amérique bleue contre l’Amérique rouge, carte non pas divisant la Nation en États mais plutôt en Comtés, voire, d’individus en individus.
Cette opposition aujourd’hui prend un tournant plus militaire car les objets de contentieux sont des objets régaliens, des frontières et des troupes, mais les questions de transidentités sont tout aussi contentieuses, en témoigne le précédent bras de fer entre l’Etat Fédéral démocrate et un Etat républicain, la Floride, sur la loi pour les droits parentaux, les diverses questions sur l’avortement, voyant s’opposer l’avortement “up to birth”, pour reprendre le terme qu’utilise certains républicains, sans restriction, voulu par les Démocrates à la limitation et à la restriction, voire à l’interdiction intégrale voulue par les Républicains qu’ils entendent appliquer dans le droit des Etats apres l’annulation par la Cour Supreme de Roe v Wade qui garantissait un avortement sans aucune limite dans toute l’Union.
La différence est de degrés dans cette affaire texane car maintenant une ligne de front est enfin tracée dans cette guerre culturelle qui mine la vie publique américaine depuis bientôt 10 ans.
C’est ainsi que l’on parle de plus en plus de l’idée d’un Grand Divorce National, où, pour raison d’idées irréconciliables, les américains se sépareraient en états bleus et rouges indépendants, dont la carte de nos gouverneurs signataires peut consister en une ébauche de séparation géographique, afin de pouvoir chacun construire leur nation, l’une progressiste et démocrate et l’autre conservatrice et républicaine, sans que l’autre camps ne vienne contrecarrer les rêves politiques de l’autre.
Si cette idée est pas réalisable pour de très nombreuses raisons, et ne serait peut être pas si souhaitable que ça, que ce soit ni pour le plus MAGA des Républicains de Floride ni pour les plus Socialistes des Démocrates de l’Oregon, il n’est pas difficile de constater qu’il y a effectivement des différences irréconciliables entre les deux parties de l’Amérique.
Bien qu’il existe encore quelques politiciens démocrates qui ont encore quelques attraits transpartisans et qui n’entrent pas entièrement dans ce jeu, comme Tulsi Gabbar, qui a fini par quitter le DNC, ou l’iconoclaste Jonh Fetterman, transfuge du progressisme vers le centre, les Démocrates traitant les Républicains de racistes et de nazis, s’aventurant de plus en plus profondément dans l’idéologie post-moderniste socialiste et intersectionnelle (y compris pour l’aile centriste des Démocrates représentée par J.Biden qui a choisi ses membres du Cabinet à l’aulne de l’intersectionnalité), les Républicains, quant à eux, voient, pour caricaturer, dans leurs adversaires Démocrates, des pédophiles satanistes et anti-américains (ce que certains démocrates revendiquent comme peut le montrer la récente affaire de la statue de Satan dans le Capitol d’État de l’Iowa) et la force du courant MAGA, montrant une image totalement décomplexée du conservatisme américain et donc facilement caricaturable et vilipendable par leur adversaire, au sein du GOP est telle que les Républicains s’accommodant du progressisme Démocrate qui était majoritaire à l’époque du néo-conservatisme bushien, comme Mitt Romney ou Nikki Halley, la concurrente de Donald Trump à la primaire 2024, sont marginaux de par leur absence de popularité et leur accommodement aux idées Démocrates dans la guerre culturelle.
L’Amérique n’est déjà plus unie, aucune élection ne peut se faire sans que le perdant, à tort ou à raison, n’accuse l’autre de tricherie tellement l’impossibilité de voir dans un compatriote aux idées différentes, autre chose qu’un traître, est grande, que ce soit au travers les allégations maintenant réfutées de H.Clinton avançant que Donald Trump aurait été élu illégitimement par intervention Russe ou bien les déclarations des Républicains très contentieuses concernant le peu de fiabilité qu’on pourrait placer dans les votes électroniques et les mail-in ballots ainsi que sur l’absence de contrôle d’identité à l’entrée des bureaux de vote (contrôles que les Démocrates qualifient de racistes par ailleurs malgré le fait que cette pratique de non vérification soit unique à leur pays) est amené à une fraude massive rendant cette fois-ci l’élection de Joe Biden, aux yeux de certains, illégitime.
Le fait est que l’Amérique ne se conçoit plus comme une nation unie, même sur le plan culturel, mais bien comme deux camps ennemis qui, pour la première fois au Texas, se font face à face dans une grande tension, armes à la main.
Néanmoins, il ne faut pas croire que la guerre civile 2.0, comme elle est surnommée, est pour demain; déjà sur les réseaux sociaux les mêmes commentateurs conservateurs, qui applaudissaient les gouverneurs républicains et brandissaient des Gadsden Flags, sont passés à autre chose, se déchirant futilement sur l’attitude à adopter face à la popularité de Taylor Swift et débattant si celle-ci est organique ou bien le fruit d’une “psyop” de la part des démocrates et de l’Etat Fédéral; Etat Fédéral qui, quant à lui, sentant probablement que d’aller ouvrir de force la frontière ne serait pas favorable électoralement à son commandeur en chef, déjà fortement impopulaire du fait de l’inflation et des écarts attribués à une sénilité apparente, a décidé, plutôt que de déclarer la guerre au Texas, d’en préparer une nouvelle avec l’Iran dont ils espèrent qu’elle a plus de possibilités de retour sur investissement d’autant plus que la Garde Nationale texane a paré la frontière sud d’image d’Hunter Biden, enfant terrible du clan présidentiel, qui, si elles sont trop exposées sur les chaînes de télévision, risquent de nuire encore plus à l’image déjà très écornée de Joe Biden.
La situation est tout de même toujours en cours et toujours brûlante, reste à voir comment elle évolue, en espérant tout de même ne pas revoir s’affronter tuniques grises et tuniques bleues.
Tout de même pour conclure, il est à noter que l’Amérique divisée a tout de même toujours recours aux mécanismes institutionnels traditionnels pour régler les problèmes frappant le pays. Ainsi, les Démocrates proposèrent au Sénat une loi sur la sécurité des frontières, le Président Biden appelant même à un consensus transpartisan autour de cette loi bien que les questions transpartisanes semblent encore plus éloignées des réalités politiques étatsuniennes de 2024. Si certains Républicains ont soutenu le texte comme leur chef au Sénat, le controversé Mitch McConnel, d’autres comme le Sénateur du Texas et spécialiste des questions constitutionnelles, Ted Cruz, l’ont sans concession rejetée, appelant le texte une “stinking pile of crap”. Cette loi est accusée d’être une “posion bill” par certains Républicains, c’est-à-dire une loi qui, sous couvert de bonnes intentions, aggraverait le problème et sous couvert de transpartisane ferait avancer avant tout les intérêts du camp adverse.
Les Démocrates, eux, au contraire, critiquent l’attitude des Républicains les accusant d’instrumentaliser la crise et de vouloir l’aggraver en ne votant pas leur texte afin de préparer les élections en se faisant passer pour des sauveurs.
S’il est vrai que cette loi ne se contente pas d’amener de l’aide au Texas (ainsi la très grande majorité de cette loi concerne l’Ukraine et dans la parti s’intéressant au Texas la majorité des passages concerne l’aide aux ONG accompagnant les migrants) et de réaffirmer la protection de la frontière (auquel les Démocrates avant cette proposition de loi semblaient très hostiles) et ainsi, à l’instar de la loi imigration française, comporte de nombreuses mesures visant à favoriser la régularisation et l’accompagnement des migrants entres autres choses, ce que les Républicains estiment dangereux pour la protection de la frontière, il est vrai aussi qu’il y a dans cette loi quelques mesures allant dans le sens de protection de la frontière, rendant le discours des deux partis, contre d’autres, entendables et témoignant au final bien de la disparition d’une vision commune du “général wellfare” promis par la Constitution, rendant de facto impossible la discussion entres Républicains et Démocrates, même sur l’essentiel. Ainsi, même pour la question de l’intégrité territoriale américaine, il semble impossible aujourd’hui de trouver un consensus.